La pêche à la mouche est une discipline qui nécessite d’excellentes aptitudes physiques, mentales et des connaissances naturalistes. Si aujourd’hui ce « loisir » se hisse au rang d’un sport de haut niveau, ce n’est pas une lubie du Ministère en charge des sports. J’ai vécu un championnat d’Europe en 2022 en tant que capitaine. Cet article aborde les différentes questions posées par des néophytes.
Quelles sont les qualités d’un pêcheur à la mouche compétiteur ?
Tout d’abord, il faut avoir un bagage technique solide et le matériel adapté pour faire face aux différentes situations de pêche. Ensuite, il faut connaître la nature et comprendre comment se comportent les poissons. Ces bases sont essentielles pour trouver les bonnes mouches et adopter les bonnes tactiques.
Les qualités physiques sont une autre composante importante. Comme les épreuves durent plusieurs heures, l’intensité de l’effort est comparable à celle d’un trail avec des moments intenses dans les courants puissants. De la condition physique dépend la capacité de concentration des compétiteurs. La perte de lucidité est génératrice de baisse d’efficacité. Il ne suffit pas d’effectuer le bon lancer au bon endroit avec la bonne mouche. Il faut savoir se positionner pour que la dérive de la mouche soit la plus naturelle possible pour séduire des poissons.
On peut comparer la pêche à la mouche à un sport multi technique tel que le biathlon mais avec une dimension supplémentaire liée au comportement animal. C’est bien le poisson qui choisit de mordre ou non. Il faut alors rester humble et même si le sportif est préparé, que le matériel est à la pointe, l’instinct animal est un facteur qui réserve sont lot de surprise.
Quelles sont les valeurs de la pêche à la mouche ?
Derrière chaque pêcheur à la mouche se cache un véritable ambassadeur de la qualité de l’eau. Pour que la pêche puisse être intéressante, il faut des poissons en bonne santé et de nombreux insectes aquatiques. Les pêcheurs à la mouche sont vigilants quant à la qualité des eaux en observant les êtres vivants qu’ils rencontrent lors de leurs sorties. Au cours de la cérémonie de clôture du championnat d’Europe, un symposium présentait les travaux menés en Norvège pour améliorer les conditions de vie des poissons. Ce pays riche en barrages, veille à ce que la migration des poissons puisse se faire dans les meilleures conditions.
Quelles sont les retombées économiques ?
Pour les pays qui accueillent des compétitions internationales de pêche à la mouche, la portée de l’événement vise à développer un tourisme durable et local. Ces rendez-vous mettent en valeur le patrimoine naturel et halieutique de régions parfois très rurales. La pratique de la pêche à la mouche est une activité de pleine nature qui ne nécessite pas d’aménagements lourds contrairement à d’autres disciplines. Les retombées économiques locales sont donc très intéressantes. Il suffit de veiller sur les milieux naturels et de promouvoir la beauté des sites de pêche pour faire venir les pêcheurs.
Quand des compétitions de sports « populaires » sont organisés dans des pays inadaptés d’un point de vue climatique, cela nécessitent des investissements colossaux pour des créer des espaces artificiels et souvent éphémères. Ce n’est pas le patrimoine naturel qui est valorisé. La pêche sportive est une manne économique qui fait vivre de nombreux guides de pêche et hébergeurs à travers le monde. La bonne santé des rivières et lacs assure la durabilité de ces espaces et préserve la biodiversité. Lorsqu’un pays est choisi par la fédération internationale, c’est très souvent en raison de la qualité de l’état écologique des milieux aquatiques. C’est une reconnaissance.
Comme tous les sports, il y a aussi un écosystème commerciale autour. Les marques de matériels, les points de vente locaux et les prestataires qui assurent l’accueil des pêcheurs, bénéficient de retombées immédiates. En Norvège, la région de Koppang est très prisées par les pêcheurs sportifs.
Explications sur le déroulement d’un championnat international :
La Fédération Internationale de Pêche Sportive Mouche (FIPS Mouche) organise des compétitions en veillant au respect d’un cahier des charges exigeant et de son règlement sportif. Les équipes s’inscrivent en ayant à la fois pris connaissance des sites de compétition, du règlement et de dispositions régionales. La pêche peut se faire à pied ou en barque ce qui implique des préparations spécifiques pour les équipes.
Comment sont composées les équipes ?
Les équipes nationales sont composées de cinq compétiteurs issus de sélections. Ces sélections sont établies à partir de critères sportifs évalués selon le classement des compétiteurs sur les trois dernières années. Des critères liés aux spécialités des pêcheurs ainsi que sur leurs capacités à évoluer en groupe sont évalués. La Fédération Française des Pêches Sportives valide les sélections via sa commission Pêche à la Mouche et son Directeur Technique National.
Comment sont répartis les compétiteurs ?
Un tirage au sort détermine les parcours de pêche de chacun des compétiteurs. Chaque compétiteur dispute cinq manches de trois heures sur cinq secteurs de pêche pour plus d’équité. Le pêcheur évolue dans un groupe de seize concurrents (un représentant par nation) et obtient un classement par manche en capturant des poissons. Tous les pêcheurs passent sur un parcours de chaque secteur de pêche au cours des cinq sessions.
Didier Daumas (manager), Jordan Gregoire, Jérôme Poirier, Lionel Fournier, Florian Caravéo (Capitaine)
Emilio Saint-Aman, Jean-Guillaume Mathieu
Quels sont les poissons recherchés ?
Avant chaque compétition, les organisateurs définissent une liste d’espèces de poissons pouvant être homologués lors des épreuves. Bien souvent, ce sont les salmonidés qui sont choisis (poissons de la famille de la truite). Les espèces peuvent changer en fonction des régions, pour que les pêcheurs découvrent des poissons endémiques. Ceci signifie que les compétiteurs doivent savoir s’adapter aux sites des compétitions et adopter les bonnes techniques.
Comment les classements sont établis ?
Chaque poisson est mesuré dans l’eau et relâché vivant dans son milieu naturel après la mesure (Tout poisson mort, est invalidé). L’arbitre indique la taille de chaque prise sur une feuille de marque qui est transmise au jury à chaque fin de manche. Chaque poisson rapporte un nombre de points et c’est la somme des points « poisson » qui détermine le classement individuel (en place) au sein de leur groupe. Un pêcheur marque de 1 à 16 points place.
Le classement individuel des compétiteurs est déterminé par la somme des places obtenues lors des 5 manches. Le plus petit nombre de points place possible étant 5 (5 fois 1er). En cas d’égalité, la somme des points poissons les départage.
Le classement par équipe est établi à partir de la somme des points place des pêcheurs de l’équipe. L’exemple ci-dessus montre que l’équipe de France gagne devant l’Espagne avec un nombre de points place identique (placings).
En cas d’égalité de points place, la somme des points poisson sert à départager les équipes. C’est ce qui a départagé la France et l’Espagne en 2022.
Quelques mots sur le fonctionnement d’une équipe : depuis 1998, l’équipe de France a récolté de nombreuses médailles. C’est avant tout la capacité des managers et capitaines à animer les équipes en misant sur la coopération qui porte ses fruits. Tout comme au biathlon, à l’athlétisme ou à la natation, l’enjeu est de savoir miser sur les qualités des sportifs qui sont habitués aux compétitions individuelles tout en les faisant travailler ensemble. Les médailles individuelles arrivent avec les performances collectives.
Et l’argent dans la compétition ?
Les victoires et places d’honneur ne sont récompensées que de médailles et parfois de dotations matériels. La Pêche à la Mouche Sportive n’est aucunement un sport où l’argent motive les compétiteurs. Ils recherchent plutôt l’expérience sportive internationale, les rencontres et la découvertes de destinations nouvelles.
Pourquoi la pêche à la mouche et pas un autre sport ?
En parallèle de la pêche à la mouche, j’ai pratiqué différents sports en visant des objectifs départementaux, régionaux et nationaux. Quand j’étais adolescent, le cyclisme était une école pour apprendre le goût de l’effort même si je n’étais pas assez passionné. Puis j’ai fait du tir sportif, une très bonne école de rigueur et de concentration. Ensuite j’ai endossé un kimono pendant jusqu’à la ceinture marron et j’en garde d’excellents souvenir notamment pour la maîtrise corporelle qu’amène cet art martial en plus de l’aspect spirituel.
Au lycée, c’est la course à pieds qui me plaisait le plus, j’ai naturellement continué de courir jusqu’à avoir un niveau confortable pour courir des semi-marathons et des trails de plus de 35km. C’est un sport que je pratique toujours avec quelques sorties de VTT.
Selon mon expérience la pêche à la mouche est le seul sport qui amène le pratiquant à maitriser autant de paramètres naturels, matériels, gestuels et spirituels. Alors oui, je pêche pour le plaisir d’être dans la nature, de voir les poissons et de pratiquer une activité physique.
2024 Championnat du Monde en France
C’est un honneur pour la France d’accueillir à nouveau un championnat du monde de pêche à la mouche. Toute les informations utiles sont sur le site ! https://www.wffcfrance2024.fish/
Merci de m’avoir lu. Je profite de cette fin d’article pour saluer les Clubs de pêche à la mouche qui forment, transmettent des valeurs sportives et environnementales aux jeunes. Tant qu’il y aura des pêcheurs au bord de l’eau, il y aura des gens pour se soucier de cet élément essentiel à la vie.
Florian Caravéo
Culture Mouche : les codes des moucheurs
Un belle article dans l’air du temps.
Quand on regarde un journal sportif dont je ne donnerai pas le nom tellement le manque impartialité est flagrant !
Ou la débandade entre ffps et fnps on ce demande où va l’avenir de notre sport…
Merci
Merci Flavien pour ton commentaire. On ne jettera pas de coquille de bigorneau sur les journalistes de l’Equipe, c’est promis 😅
Bonjour Florian,
Très bel article sur la pêche à la mouche, interessant à lire et instructif ! Ce sport est magnifique et est en communion avec la nature ! Que demander de plus ?
Merci pour le soin apporté aux poissons pour qu’ils restent en vie !
Merci Christine pour ce gentil commentaire 😉
Au plaisir.
Florian
Hello my friend Florian,
We met many years ago at 5 Nations in Scotland, I enjoy your articles, and the French anglers are at the top of their game.
Thank you again,
Robbie Phelan
Ireland.
Hi Robbie,
Many thanks for your kindness.
I was pleased to meet you in Scotland and I really appreciate your message.
I hope the translation in English is quite good.
Talk soon.
Tight lines
Flo